Communiqué de la Fédération Bretagne Nature Environnement*
Les réformes successives de la PAC ne sont pas parvenues à atteindre l’objectif de préservation des ressources (eau, air, sols, biodiversité), ni le maintien de l’emploi agricole ou l’atteinte d’un revenu satisfaisant pour les paysan-nes.
La prise de conscience d’une majorité d’acteurs agricoles, l’évolution des politiques publiques répondant à la demande sociale et aux exigences des directives européennes, ont conduit à améliorer partiellement la situation. L’insuffisante baisse des nitrates ne doit pas en outre masquer, ni l’eutrophisation généralisée des plans d’eau, ni le maintien d’un haut niveau d’échouage d’algues vertes, ni la contamination élevée par les pesticides, ni l’érosion continue de la biodiversité ordinaire des zones agricoles. Des initiatives très positives (développement de l’agriculture biologique, systèmes herbagers, porc sur paille) ont émergé et permis à des milliers d’exploitations de combiner performance économique et progrès environnementaux. Nos organisations dressent donc un bilan plutôt positif de la gestion par la Région de ces dispositifs qui ont rencontré un franc succès prouvant la capacité et la volonté de nombreux paysans et paysannes à s’engager dans une démarche de transition agroécologique.
Nous regrettons donc les premières annonces du gouvernement concernant le dossier PAC-2020 et notamment la volonté affichée de reprise en main au plan national d’une grande partie des aides du 2e pilier. Nous les regrettons d’autant plus que nous sommes favorables à la demande formulée par la Région Bretagne d’expérimenter une gestion totale de la PAC (pilier I et II). Ce budget de près de 500 M€/an est un formidable levier pour orienter l’agriculture bretonne et mettre enfin en cohérence les deux piliers, pour que l’ambition affichée par la Bretagne du «bien manger» passe aussi par le «bien produire». Bien produire, c’est pour nos organisations permettre à l’économie bretonne de faire du dérèglement climatique, et de l’effondrement de la biodiversité, une priorité.
Elle devra permettre de se poser les questions essentielles comme celle de l’accompagnement à la baisse du nombre d’animaux produits en Bretagne, levier essentiel de la baisse des émissions de GES, des consommations d’eau et des importations de soja (déforestation importée). D’autres enjeux prioritaires devront en découler, renouvellement des générations et maintien de fermes à taille humaine, transition énergétique, sortie des pesticides, relocalisation de la production et de la consommation, restauration et préservation de la biodiversité.
Pour atteindre ces objectifs, la régionalisation totale de la PAC en Bretagne devra intégrer une ouverture des instances de gouvernance à la société civile et aux décideurs en charge de l’environnement et de la santé à l’échelle régionale.L’objectif environnemental ne pourra pas être atteint sans une cohérence avec le volet économique et social, et notamment le principe même d’une rémunération des actifs plutôt que des hectares, par :
– une aide minimale ou «petite ferme» de 5000 €/actif paysan et un plafonnement à 25000 €,
– un transfert du 1er pilier vers le 2è pour accompagner les paysan.nes dans la transition,
– des aides au développement de l’autonomie protéique et à la baisse du nombre d’animaux,
– un soutien marqué à la prairie et au système bocager,
– un grand plan d’installation agroécologique, vivrière, bas carbone et reliée au territoire.
Concernant le second pilier la priorité doit être donnée à l’accompagnement de la transition par :
– la poursuite et le renforcement des MAEC systèmes et aides bio (conversion et maintien),
– la création d’aides à la diversification, à la baisse des cheptels, à la montée en gamme et à l’autonomie des fermes,
– le relèvement de l’âge limite pour percevoir l’aide à l’installation et une Dotation Jeune Agriculteur (DJA) qui intègre les nouveaux enjeux.
Enfin, nos organisations appellent à renoncer à tout financement public des assurances privées, ainsi qu’à l’application de nouveaux critères d’éco et de socio conditionnalité de toutes les aides publiques au redémarrage de l’économie. Elles appellent également la Région à s’engager à ce que cet argent de la PAC s’attache à permettre la régulation des marchés et la maîtrise des productions pour prévenir les crises et garantir des prix agricoles rémunérateurs ainsi que l’amélioration générale de la résilience des fermes.
Par ce communiqué nos organisations associatives, qui représentent plus de 150 associations bretonnes engagées pour la protection de la nature et la transition écologique, demandent au gouvernement de répondre favorablement à la demande de la Région Bretagne d’expérimenter une gestion totale de la PAC (pilier I et II) au service des consommateurs, des paysans, des milieux naturels et du climat.
* FBNE fédère les associations de protection de la nature bretonne, fondée par Bretagne Vivante, CoBEN, Eau et Rivières de Bretagne, Groupe Mammalogique Breton, UMIVEM, VivArmor Nature – Relais de France Nature Environnement.